Elle se bouffe, se dévore, elle te traverse les tripes, elle te tient debout, elle te ronge ou te picore, ta vie.
Les saveurs sont toutes là, et oui, ça goûte. L’amer relevé d’une pointe de sel, comme le pamplemousse que tu savoures avec le crabe. Ou le chou de ton enfance, ou le médicament. L’hiver d’ici te mord les joues, mais la chanson de la neige silencieuse, mais les luges sur la citadelle, mais les toits blancs et le feu de bois, le chocolat chaud et les sourires magnifiques des petits d’homme.
Les pousses de printemps ont des saveurs acides, des citrons pétillants et des oranges sanguines, des rouges et des bleus, ma sève montante, trésors.
Et puis le sucre des bonheurs, le sucre d’un ciel laiteux, la douceur d’un automne aux musiques de feuilles, et ces moments de pure joie, à l’humain qui entend ce que tu écris, à ceux qui chantent aux mêmes airs que toi. Le caramel des sens, s’enduire l’âme à en éclater les rêves, goûter les heurs de la création, et ceux du partage, les soirées à refaire le monde, ou à le découvrir, les errances à sourire.
Et quand tu crois que c’est la fin, sursaut encore, et le cacao ou le vin, ou le sel d’une peau, mais le goût dans tous les cas. Et les fruits les plus doux se cueillent maintenant, dans des couleurs de bois, sous des draps noirs de soie, quand la vie a dessiné les lignes que le sourire révèle.
Ouvre la bouche.
Les mots tombés du lit : vie, automne, mordre, sourire.